Paranoid Paul – Note d’intention

12 avril 2022

Un petit groupe de jeunes adultes qui se connaissent depuis l’enfance semble avoir fait de Paul son souffre-douleur sous l’influence de Gregg. Même s’il n’est jamais là en personne, on parle continuellement de ce garçon au comportement étrange, solitaire et fuyant. C’est comme une obsession personnelle qui serait devenue celle de tous. Paul ne fait pas partie du groupe mais il en est la pièce maîtresse, le ciment. Paranoid Paul (You stupid little dreamer) retrace l’histoire d’un antagonisme enraciné dans l’enfance, d’une longue obnubilation, d’un engrenage irréfrénable, d’une progressive altération mentale. L’histoire d’une double disparition. L’histoire de « deux braves garçons, selon leurs mamans ».

LE PROJET

Début 2020, j’ai lancé un nouveau projet autour du texte Paranoid Paul de l’auteur Simon Diard. J’ai eu envie de mettre en scène ce groupe de jeunes adultes qui reviennent sur un épisode de leur adolescence pour questionner notre comportement face à l’individualisme et au manque croissant d’empathie. J’ai ressenti l’envie et le besoin de réunir une équipe pour questionner les lâchetés humaines et les possibilités de résistances qui subsistent. J’ai découvert l’écriture de Simon Diard grâce au comité de lecture du théâtre du POCHE /GVE. Ses textes, à la lisière entre écriture chorale et dramatique, avec des accents cinématographiques, plongent dans des situations-limites où les récits et les projections fantasmatiques des personnages conduisent à s’interroger sur le passage de la pulsion à l’acte, de la simple imagination à la violence réelle.

Visuel illustratif du spectacle PARANOÏD PAUL, © DR

PARANOID PAUL – UNE MACHINE À JOUER

Le texte Paranoid Paul m’a tout de suite attrapé par les thèmes puissants qu’il explore : pression sociale, harcèlement, catharsis, et disparition. Il m’a ensuite séduit par le jeu de rôle qu’il met en place. Dans sa pièce, Simon Diard convoque cinq personnages qui reviennent sur la naissance de leur histoire commune, quand leur groupe comptait sept membres. Ils vont, dans leur récit, devoir prendre en charge la partition, le caractère et les réactions et autres provocations des deux disparus.

Ces tentatives de travestissement ludique montrent le besoin des personnages de comprendre et de s’approprier cette histoire. Se met alors en place un jeu drôle, parfois touchant, souvent grinçant, presque sauvage. Le plaisir de jouer, l’obligation sociale d’y participer, les encouragements des autres, les blessures et les fantasmes personnels risquent de faire dérailler le jeu vers la cruauté et la violence.

Ces situations tendues, où le jeu se confond avec la réalité, créent des moments de suspens et de malaise. De plus le jeu fictionnelle proposée par la pièce se confonds avec le jeu et la réalité des acteurs qui en complicité avec le publique montrent qu’ils jouent à jouer en toute conscience. Il y a donc plusieurs niveaux et beaucoup d’allers et retours entre ces niveaux. Nous tisserons des système de jeu, sortes de règles du jeu, pour profitez de façon ludique de tous les possibles que permettent ces situations.

Les personnages ne peuvent s’empêcher de reproduire leur propre version de la disparition de leurs proches, pour chercher une explication. Ces versions élaborées par les personnages, alimentées par leurs fantasmes, vont ainsi fluctuer entre l’assassinat prémédité, l’accident bête et stupide jusqu’à une joyeuse parodie de règlement de compte sanguinolent. Autant de tentatives d’expiation dans l’espoir de s’affranchir de leur passé et de pouvoir enfin commencer à vivre. Sur scène, les personnages passent donc par toutes les étapes nécessaires pour surmonter un traumatisme et rendre leur suite de vie possible.

— Bastien Semenzato, printemps 2021

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